jeudi 28 avril 2016

La vie pourpre

Il était 14h31, un samedi où j’apprenais encore à vivre une semaine sur deux sans mon fils. Malgré le soleil, malgré l’apparente liberté qui s’offrait à moi, malgré mes amis, malgré ma famille, malgré une agence florissante, j’étais enfermé en moi.



J’écoutais le dernier concert de Prince à Atlanta. Il avait été retrouvé sans vie deux jours auparavant dans un ascenseur. Prince mort, ramenant à ma mémoire des souvenirs de fêtes du Nouvel An en famille dans les années 80, à Ahuntsic sur la rue Berri; ramenant comme si j’y étais cette prestation de Purple Rain aux American Music Awards en 1985. J’avais 14 ans et à l’époque je ne comprenais pas pourquoi sa musique résonnait autant en moi. Il était 14h31 et j’étais à la fois en 1985 et en 2016. Ma vie était pourpre. Mon regard voilé.
Les départs de grands témoins de notre existence nous enlèvent un peu de ce que nous sommes. Ils révèlent notre propre impermanence.
Quand je suis revenu à mes esprits, une heure plus tard, j’ai compris. « I never meant to cause you any sorrow. I never meant to cause you any pain ». Aussi simple que ça. La culpabilité, la nostalgie: je suis mal conçu. Anachronique.


Prince Roger Nelson s’est immiscé dans ma vie avec son tube écorché, mais il s’y est incrusté parce qu’il refusait les compromis. Ni sur son art, ni sur son sexe, ni sur ses amours, ni sur ses amitiés. Il a chevauché le passé et redéfini une époque. Il a séduit avec ses yeux, sa voix, ses tripes et ses hanches. Sa teinte était unique. Elle m’habitera longtemps.
Mathieu


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