La créativité publicitaire n’a de limite que celle de l’imaginaire, et c’est pas mal la beauté de la chose. Remâchez des influences culturelles, repensez un plan génial vu dans un film de Kubrick, digérez un courant musical ou un refrain de Lykke Li, éclatez-vous sur un saut créatif absurde, sur la simplicité d’un symbole, misez sur la beauté d’une image qui évoque un clair-obscur de Goya ou encore sur l’interprétation géniale d’une comédienne irrésistible de candeur, tout est possible. Absolument tout. Tant que ça a rapport.
La marque pour la marque, quand le symbole ne concorde pas avec son essence, quand l’idée conceptuelle est trop «far-fetched», quand le consommateur sent instinctivement que l’opération est cousue de fil blanc; la marque pour la marque dans un espoir de gain en notoriété lié à la mémorisation bête et stérile dénuée d’émotion ou de sens; la création pour le prix d’un concours qui permet de frimer avec des milliers de frimeurs qui se balancent de vous sur la Côte d’Azur, le concept décalé qui dégage un malaise et qui fait de la marque un répulsif, tout ça est inutile mais encore, malheureusement, trop courant.
Dans ce message pour la carte de crédit chinoise QQ Caibei par l’agence Leagas Delaney de Shangai, une oie est mise en vedette pour évoquer les possibilités illimitées que rapportent les points de récompense de cette carte. Le lien est indirect, l’idée absurde et la pertinence absente. Un bel exemple de ce qu’une créativité sans racine peut apporter à une marque, et là je parle de vide. Je conçois que le contexte culturel diffère du nôtre, n’en demeure pas moins qu’il manquera toujours quelque chose à cette publicité: le rapport.
Le rapport n’est pas toujours sexy, il émane souvent d’un travail pénible de recherche et de compréhension que les créatifs aiment éviter. Mais en bout de ligne, aucune grande idée ne pourra s’en passer, car le rapport en création publicitaire, c’est tout simplement une question de vie ou de mort.