dimanche 17 novembre 2013

Le lien



«When love is gone, where does it go?»

Certains symboles touchent directement aux fondements de ce que nous sommes, à la fois individuellement et collectivement. L'amour vend parce que l'amour nous tue ou nous élève tous. La douleur du manque de l'autre comme l'euphorie du coup de foudre marquent si fortement nos vies qu'ils en deviennent des pointeurs émotionnels d'une rare intensité. Les grands réalisateurs du septième art savent exprimer leur vision du monde tout en utilisant ces pointeurs pour provoquer l'émotion. Un être vulnérable nous rappellera notre propre vulnérabilité, une femme blessée nous ramènera à des expériences personnelles, un enfant délaissé nous rapprochera de nos propres enfants, voire de soi-même dans un voyage dans le temps. Nous ressentons les émotions car elles nous ramènent à des endroits qui ont imprégné notre mémoire d'une manière unique. Certaines personnes n'arriveront jamais à sortir de ces moments tandis que d'autres y replongeront sporadiquement. Mais rares sont ceux qui y échappent totalement.

Pendant ce temps, la plupart des annonceurs, à certaines exceptions près souvent associées au luxe, au design et à la mode, s'entêtent à nous balancer des publicités pas très drôles qui promeuvent des rabais momentanés pour nous attirer en points de ventes. Et franchement, on s'en balance à un point tel que ces publicités sont volontairement zippées ou zappées. Mais les annonceurs persistent. Faut bien que les budgets marketing se dépensent, que les emplois se maintiennent et que des alliances entre des agences et services de communications se consomment. On mesure, on tente de prouver que ça fonctionne. Et quand ça ne fonctionne pas, on blâme la conjoncture. Du gros nivellement par le bas justifié par la peur du changement et les impératifs commerciaux à courte vue.

Ma conception de la publicité se rapproche plus de l'association émotionnelle entre du contenu et une audience. Par du film qui mérite d'être vu, qui nous rend meilleur, qui nous aide à mieux comprendre le monde; et avec des marques qui se positionnent dans ce contenu en prônant des valeurs distinctes, un langage unique, bref, par une histoire qui synthétise la promesse tout en la liant intimement au parcours de la cible. J'imagine des achats effectués par intérêt primaire, oui, mais aussi et surtout par un attrait qui ressemble plus à une cohérence des valeurs d'un individu.

Votre chaîne  de magasins vend moins cher? Pourquoi ne pas prôner la démocratisation et l'accessibilité au lieu des approches promotionnelles connes destinées à des lobotomisés qui n'existent pas? Vous êtes une télécom bleue qui désire montrer qu'elle est redevenue digne de considération? Pourquoi ne pas incarner la réhabilitation et la deuxième chance si fortement ancrées dans l'ADN du rêve américain, plutôt que de véhiculer des préjugés sexistes sur le hockey? 

Une publicité qui se donne la peine de voir plus loin que le bout de son nez, des stratèges et créatifs qui sortent du paradigme publicitaire classique pour envisager l'encodage et le décodage différemment, et une population qui investit quelques secondes de son temps par choix, par intérêt réel envers la pub: voilà ma vision, mon rêve idéaliste. Ne soyons pas naïfs, à l'extérieur de certains cercles restreints, l'amour de la publicité a massivement déserté une population déçue et trahie. Reviendra-t-il?

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