« Les gens stupides ne voient la beauté que dans les belles choses. »
La beauté dans la survivance. Dans cette volonté d'amour inconditionnel. Dans la pureté du sentiment. La beauté dans la souffrance, dans la révélation de la violence et de la haine. La beauté du symbole qui transcende les cultures et les frontières. Toute la beauté du monde ailleurs que dans l'image que nous nous faisons de la perfection. La beauté, toute la beauté du monde, dans la misère du monde. La misère qui devient signifiante, à des années lumière de l'illusion provoquée par le désir adolescent de devenir un clone de couverture de magazine. La beauté, toute la beauté du monde, dans l'unicité, dans les anomalies, dans ce qui nous impose le mépris de notre propre vanité.
La publicité expose généralement toute la laideur du monde, à grandes doses d'implants, de dents trop blanchies et de proportions irréelles des corps. Toute la laideur du monde à vouloir vendre aux masses une conception irrationnelle de l'humain. Une laideur qui supprime les cernes, les rides, les bourrelets et alimente l'anxiété du rejet. Mais elle n'a pas à demeurer ainsi, à l'encontre de la vie.
À la suite de ma visite de l'exposition World Press Photo avec mon équipe vendredi dernier, une expérience qui nous démontre justement, entre autres choses, toute cette beauté dans la souffrance, il est impossible de demeurer insensible à des réalités bien tangibles qui se déroulent à moins de douze heures d'avion de Montréal. Impossible de ne pas réaliser l'insignifiance de nos problèmes et de nos angoisses, mais surtout, impossible de ne pas réprouver cette pulsion de célébrer la vie en la vivant pleinement, sans concession, une seconde à la fois.
Crédit et description de la photo
Par Ebrahim Noroozi. Une femme et sa fille à Bam en Iran, dont les visages ont été aspergés à l'acide par le mari (et père) lors d'une nuit, à la suite des demandes de séparation formulées par la femme. Sa fille et elle s'embrassent car elles sont seules au monde à pouvoir et à vouloir le faire. Photo gagnante du premier prix dans la catégorie «Portraits» du World Press Photo 2013.