J’ai récemment dénoncé la minceur du contenu d’une campagne publicitaire de la Canadian Association of Petroleum Producers, qui tentait bien maladroitement nous faire avaler que l’exploitation des sables bitumineux albertains respectait l’environnement. Ces andouilles croyaient vraiment nous convaincre que la régénérescence des arbres et de la faune était assurée avec quelques paragraphes de texte maladroit et quelques photos racoleuses. Et bien, j’ai le plaisir aujourd’hui de vous présenter, si vous ne l’avez pas encore vue, une campagne encore plus trompeuse, mais cette fois-ci dans le bon sens. Une création qui nous mène sur une fausse piste pour ensuite pulvériser en millions de grains de sable gluants l’image de l’Alberta et son contexte environnemental lié à l’exploitation des ressources pétrolières. Rethink Alberta. Yeah!
Cette offensive publicitaire, initiée par différents groupes verts, la plupart américains, est axée sur un film publicitaire de 90 secondes diffusé sur youtube et sur le site rethinkalberta.com. La convergence vers le film est orchestrée à partir de bannières publicitaires, d’achats de mots-clés reliés au tourisme de l’Alberta et à des panneaux d’affichage diffusés dans 4 villes américaines ciblées, soit Portland, Denver, Seattle et Minneapolis. On frappe dans le mille. Et là où ça fait le plus mal, en comparant l’impact des sables bitumineux à la catastrophe BP. Les images parlent d’elles-mêmes et sont difficilement répudiables. Mais mieux encore, le sens du «timing» de l’offensive ne pourrait mieux tomber. De un, le désastre écologique dans le Golfe du Mexique entraîne des moratoires sur le forage en mer, ce qui amplifiera la pression sur la demande en pétrole issu des sables bitumineux. Or, cette demande accrue provoquera une accélération du développement de ce secteur polluant, mais cette accélération demeurera politiquement et intrinsèquement liée à l’opinion publique. De deux, la clientèle ciblée, les touristes américains qui seraient tentés de visiter l’Alberta, est constituée d’individus qui recherchent les grands espaces et la nature. On pourrait donc extrapoler sur l’effet doublement démotivant de la publicité sur ces segments fort probablement sensibles à la cause environnementale. Et de trois, la plupart des médias canadiens ont parlé de la campagne et le gouvernement provincial de l'Alberta promet de répliquer, ce qui donne encore plus de visibilité à l'initiative. Qui dit mieux?
Ça fait du bien de constater que la publicité peut parfois servir à dénoncer les abus et l’injustice. Qu’elle peut être réellement utile. Que notre rôle, à nous les publicitaires, ne se limite pas qu’à encadrer des univers de marques à des fins purement commerciales, dans un pays qui tire une trop grande partie de sa richesse dans la ruine d’écosystèmes, à contre-courant de l’intérêt collectif. Et dont trop d’habitants, dont beaucoup ici au Québec, éprouvent malheureusement une fierté irrationnelle à conduire des pick-up.
Je vous invite à signer la pétition sur le site. Pour en savoir plus sur la campagne, un article assez complet de Radio-Canada.