Clotaire Rapaille a communiqué la semaine dernière un état de la situation de sa psychanalyse de la Ville de Québec. Cet exercice fait partie d’un mandat de branding que lui a octroyé St-Régis en personne, désirant apporter à SA ville un petit facelift à la suite de l’exubérante expérience collective que furent les Célébrations du 400e. Exit donc la dénomination «Vieille Capitale», qu’on désire remplacer par un énoncé plus actuel et plus près de la population et de sa réalité. Selon Rapaille, Québec aurait de la difficulté à se définir sans se comparer à Montréal. Il y aurait une sorte de bipolarité inquiétante qui régnerait chez ses habitants : ces derniers s’élèveraient facilement dans le délire et le complexe de Dieu (Célébrations du 400e) ou sombreraient tout aussi rapidement dans le délire de persécution et de destruction (l’importance démesurée accordée aux radios poubelles). La nouvelle a été reprise et interprétée par différents médias, Patrick Lagacé a blogué là-dessus, bref, je ne reviendrai pas en profondeur sur ce sujet assez controversé mais plutôt sur Clotaire lui-même et sa démarche, car lui, c’est tout un sujet.
J’ai lu « Culture Codes » il y a deux ans. Le personnage, sorte de Dandy sorti d’une autre époque m’intriguait, particulièrement à la suite d’un reportage à Radio-Canada et d’une discussion avec une cliente. En gros, il psychanalyse des groupes témoins de certaines cultures ou sous-cultures pour en extraire les empreintes acquises dès l’enfance et qui détermineraient par la suite leurs comportements distinctifs, particulièrement en terme de consommation. Il s’appuie sur le principe qu’une partie de nos actions et de notre faculté à choisir nous échappent et se situe ailleurs que dans notre conscience individuelle, c’est ce qu’il appelle la conscience collective. Ce qui m’avait le plus impressionné avait été sa réussite à faire boire du café aux japonais. Fallait le faire car le «code inconscient» du café pour les Japonais était inexistant. Niet. Nada. Rien. Ils ne buvaient que du thé. Alors comment leur vendre ce produit? En l’intégrant graduellement dans la palette de goût des enfants à travers les confiseries, crèmes glacées et autres trucs pour façonner une empreinte sociologique inconsciente du café chez les Japonais, empreinte qui les porterait à boire du café à l’âge adulte, retrouvant dans ce goût désormais acquis un endroit confortable et connu relié directement à des moments agréables de l’enfance. Disons qu’il avait le bon client pour faire ça, un leader mondial, et non le moindre : Nestlé!
Alors que va-t-il faire avec la marque de la Ville de Québec? Saura-t-il innover en révélant un angle qui favorisera la communication de son réel potentiel de séduction à l’étranger, au-delà du décryptage appréhendé des névroses collectives? Pourra-t-il réussir à convaincre les autorités d’entériner ses recommandations tout en ayant la majorité des radios poubelles et des «angry white males» de la région sur le dos, même s’ils ne reflètent pas l’opinion de la majorité? Bonne chance.
Sachant que les membres de ce segment qu’on pourrait appeler « Les négatifs chroniques » accaparent les ondes mais ne comprennent généralement pas grand chose au marketing innovant, qu’ils sont ignares en ce qui concerne les matières psychosociales, que leur opinion homogène en matière de gestion de la marque ne vaut probablement pas plus qu’une brise nauséabonde, j’aurais seulement un conseil à formuler à notre très cher Clotaire : surveillez vos arrières!