La publicité est à l’image de la société, elle évolue, elle se replie parfois, se cherche, se retrouve, reprend son rôle d’innovateur, mais de tous temps, et c’est toujours aussi vrai aujourd’hui, la publicité va vite. Et quand je dis vite, je parle du rythme qu’elle impose à ses stratèges et à ses créatifs. Ce rythme enlevant représente à la fois ma plus grande source de satisfaction et ma plus grande frustration. Les semaines qui se succèdent à un rythme fou, les mandats qui se bousculent et l’adrénaline qui coule à flot, particulièrement avant et pendant les présentations, c’est bien beau, mais il y a un lourd prix à payer. Les semaines qui se bousculent deviennent vite des années, nos enfants vieillissent trop vite, et le corps en prend souvent pour son coup. Sans compter une petite voix qui nous répète souvent, sans qu’on sache trop pourquoi, ou enfin sans qu’on veuille trop y réfléchir: «Tout ça pour ça? Pour de la publicité? Vraiment?».
Claude Cossette, l’un des plus grands publicitaires de l’histoire du Québec, a quitté la publicité en 1984, apparemment pas mal désabusé, et ses essais ultérieurs, dont «La publicité, déchet culturel», ont confirmé depuis sa grande préoccupation pour l’éthique et les effets collatéraux de la publicité sur la société. Et voilà que cette semaine, Alex Bogusky, associé fondateur de ce que nous pourrions appeler la meilleure agence du monde, Crispin Porter + Bogusky, créatif de la décennie selon Adweek, quitte le monde de la publicité pour mieux «sentir les fleurs». Il a 47 ans. Et son cas n’est selon moi pas aussi isolé qu’on le croit.
Ce billet n’a pas d’intention particulière, autre que celle de souligner, sans prétention, l’importance de prendre son temps, de ralentir le temps qui passe, pour le ramener à une dimension plus humaine. Que même si nous sommes parfois au cœur de notre parcours professionnel, toute cette pression et ce stress quotidien, qu’ils viennent des autres, des clients, du milieu, ou de soi-même, ne vaut pas qu’on oublie implicitement l’essence même de sa vie: prendre conscience de chaque inspiration, de chaque expiration, pour encore mieux voir en avant, tout en profitant au maximum de ce qui nous glisse lentement et inexorablement entre les doigts, notre existence et celle de ceux que nous aimons.
Je vous laisse sur un clip d'une chanson qui va intuitivement dans ce sens, de mon groupe fétiche, Radiohead: Everything in its right place.
Prendre son temps... Drôle d'expression. J'préfère dire vivre son temps. Le temps coule comme de l'eau et quand on cherche à le saisir, il se faufilera entre nos doigts à tous les coups. Tandis que de vivre le temps nous place plus facilement en tant que spectateur de notre vie. On est acteur, évidemment, mais si l'on ne se place pas en spectateur on ne fait que bouger sans même prendre le temps de voir, sentir, goûter et toucher ce qu'il y a devant nous.
RépondreSupprimerJ'ai goûté au milieu publicitaire 2 ans de temps. Je n'étais qu'un humble infographe traité en concierge et surutilisé à toutes les sauces auxquelles les autres ne voulaient s'appréter. Comme tant d'autre, je me suis donné à fond car la carotte qui me pendait au bout du nez me faisait miroiter bien des choses pour mon futur.
Après 2 ans, ils ont fait des coupures massives (5 employés sur un quinzaine :P) et j'suis tombé au chômage. C’est la seconde fois dans ma vie que j’fais partie d’une Journée Noire d’une compagnie (l’autre cie avait été vendue à Toronto. 70% devenait sans emploi). Non seulement la carotte était tombée mais j'ai trébuché deçu pas à peu près.
C'est là que j'ai appris à vivre mon temps. Ce n'est pas d'être paresseux. C'est de faire la différence entre avoir l'air occupé et être productif. Entre avoir des contactes et connaître des personnes. C'est d'être à l'écoute et pas seulement parlé. C'est de réaliser que, peu importe notre carrière, à la fin on ne vivra pas plus vieux pour autant. C'est de comprendre que la seule chose que l'on possède vraiment et qu'on oubli souvent, c'est que notre vie est vraiment entre nos mains et nous en faisons ce que nous voulons.
Nos ''responsabilités'', nous nous les imposons nous-même.
Aujourd'hui j'suis dans le département marketing d'une compagnie de jeux vidéo géniale. J'travaille avec une équipe que j'adore sincèrement. J'ai un horaire régulier même si je suis très occupé et mes journées se finissent chez moi accompagné des deux plus belles filles du monde.
Le travail c'est la base de notre société nord-américaine, on ne peut y échapper, mais ce n'est pas vrai que de se perdre dans notre emploi nous rapporte un jour.
Le temps, ça ne peut que se dépenser. J'aime bien être économe. :P
Très beau billet en ce vendredi, Mathieu. Je comprends qu’il te tienne à cœur. Tout ceux qui liront celui-ci vont probablement profiter un peu plus de leur fin de semaine. ;)
Un mot: Amen!
RépondreSupprimerÇa me rappelle le billet de Roch Courcy pour lequel tu as émis un commentaire (Sommes-nous trop dépendants des médias sociaux?). En publicité, comme avec les médias sociaux, il faut savoir décrocher et garder un équilibre psychologique.
RépondreSupprimerC'est drôle que tu mentionnes nos enfants que l'on ne voit pas grandir, car c'est la naissance de mon fils qui m'a permis de comprendre l'importance de prendre, de vivre et d'apprécier son temps... J'adore les communications (principalement la pub et le marketing), mais j'adore aussi ce que la vie a à offrir... la famille, les enfants, les amis, le plein air, le bon vin et les bonnes bouffes ;) ...