jeudi 29 juillet 2010

Cette pub conne, c'était leur idée!


Microsoft diffuse au Québec une série de publicités vantant les mérites de Windows 7 depuis près de 18 mois, la plus fréquente étant celle montrée en intro. Pourquoi un billet sur cette publicité? Parce qu'elle me donne égoïstement l'opportunité de disséquer quelques erreurs grossières.

En premier lieu, il faut absolument noter le contexte culturel qui est totalement à côté de la plaque. Les gens de Microsoft et de son agence ne font visiblement pas la différence entre les cultures québécoise et française. Ne vous méprenez pas sur mes intentions, j'adore la France, mais quand on m'assaille avec une pub sans me donner la moindre chance de m'y projeter, avec mon vécu et ma culture propre, on mine dès le départ ses probabilités de réussite. Certains concepts réussissent à passer outre ces barrières culturelles, mais ils se situent au-delà de la mêlée sur le plan créatif, ce qui n'est visiblement pas le cas de cette publicité. Qui plus est, en plus de mal communiquer aux Québécois, elle peut être interprétée comme méprisante et stratégiquement paresseuse de la part de l'annonceur. Achèteriez-vous un produit d'une entreprise qui ne ferait pas le moindre effort pour vous comprendre? Sortiriez-vous avec un gars ou une fille qui vous parlerait comme si vous étiez quelqu'un autre?

En second lieu, grave problème de tonalité. S'il y a une chose assez évidente en publicité, c'est qu'on peut difficilement créer de toutes pièces la spontanéité et proposer un humour naturel, sans avoir recours à des comédiens talentueux et bien dirigés. Or, ce concept, qui semble être à cheval entre la téléréalité et la mise en scène, sonne terriblement faux. La comédienne tente de paraître sympa mais elle n'y arrive pas. Elle devient, au contraire, particulièrement irritante, surtout parce qu'elle tente d'en faire trop. J'espère pour elle et son entourage qu'elle n'est pas, dans la vraie vie, la nunuche hyperactive qu'on voit dans cette publicité. En plus, le montage est bâclé et les effets spéciaux pas bien réussis, surtout celui qui feinte «l'illumination». Une «job» de juniors pour un compte des ligues majeures.

En dernier lieu, la stratégie de création me semble discutable. On veut vraiment nous inciter à croire que Windows 7 est le fruit d'une démocratisation de ses usagers et qu'il répond à leurs désirs au point où ils croient être à l'origine de ses nouvelles fonctions, de là le pathétique énoncé artificiel final: «Je suis PC, et Windows 7, c'était mon idée». De plus, on essaie vainement de repartir de manière implicite les guerres de clocher entre Mac et PC, et par le fait même, de favoriser le sentiment d'appartenance à un logiciel beige qui succède tant bien que mal à l'épisode catastrophique de Vista (implicitement admis dans la pub). Selon moi, toute cette approche est basée sur de mauvaises prémisses, car les gens s'en balancent vraiment. Il n'y a tout simplement pas de réelle connexion émotionnelle entre Windows et ses usagers. J'utilise Windows tous les jours et c'est plate. Il fallait partir de là, lucidement, au lieu de se créer des chimères.

Toutes ces défaillances sont, et c'est le dernier clou dans le cercueil, amplifiées par une fréquence de diffusion qui mine carrément la marque. Alors que voulez-vous, je vais continuer à zapper et à zipper cette pub jusqu'à ce que cet annonceur plutôt inconscient sorte de sa bulle de savon rose et se renouvelle un peu, probablement avec la sortie de Windows 22 en 2048. C'est malheureusement une autre démonstration flagrante d'une multinationale qui se tire un coup de douze dans le visage avec sa publicité, au lieu de bâtir une réelle «conversation» avec ses clients et prospects. Des millions de dollars jetés à l'eau. Et c'était leur idée.

lundi 26 juillet 2010

Savoir s'écouter

Voici un petit cas vécu qui relève plus des affaires que de la publicité, mais en ces vacances de juillet, je le trouvais pertinent.

L'an dernier, un prospect nous appelle à l'agence. Il a de multiples projets et recherche une firme qui saura l'aider sans le déculotter financièrement, selon ses dires. Il est dans l'immobilier et les assurances de personnes, possède un domaine, un vignoble, une boutique en devenir, bref, la totale. Super intéressant. Connaissant peut-être ma passion pour le vin et la bouffe, vous pouvez vous douter que j'ai rapidement rencontré le prospect en question. Je lui ai soumis une offre de service honnête et complète dans les jours qui ont suivi notre rencontre. Puis une autre à sa demande car ses besoins avaient changé. Rendu à la troisième version, après une visite de son domaine et pas mal de temps investi, je lui ai carrément signifié que nous avions fait notre bout de chemin et que c'était à son tour d'avancer: qu'il fallait être deux pour danser le tango. Provoqué dans son égo, il a signé la proposition illico et nous a donné un joli dépôt. Nous pouvions travailler. S'en suivirent des études de marché, une identité visuelle, puis un autre projet de branding, en immobilier celui-là. Le client était très heureux, tout progressait, mais une petite voix me disait de faire attention. Le client changeait constamment d'idées, c'était un charismatique passionné, mais il manquait visiblement de focus. Là où il semblait réellement d'un niveau supérieur en inspirant ses troupes, il paraissait tout autant disloqué en terme de rigueur. Je le sentais de plus en plus mal. Voyez-vous, j'ai débuté mon parcours d'entrepreneur en 1994, j'étais au début de la vingtaine, alors les erreurs de gestion, les arnaques d’entrepreneurs douteux et les fausses promesses, j'avais tout expérimenté ça à mes dépends et à ceux de mon associé de l'époque, avec qui j'apprenais à la dure les rudiments d'être homme d'affaire. Après discussions à l’agence, nous avons décidé de continuer à collaborer avec ce client, mais je l'avais cependant à l'oeil.

Premier indice: un client qui, avant même de signer son premier contrat avec vous, vous harcèle pour que vous preniez une assurance vie visiblement étrange, c'est louche (faut pas mettre la charrue avant les boeufs et apprendre à se connaître). Deuxième indice: quand l'entourage dudit client vous semble sous son emprise, faut vraiment lever un drapeau. Rouge de préférence. Alerte gourou! Troisième indice: quand tout ce que le client avance n’est que du vent difficilement mesurable, que ses projets résident plus dans sa tête que dans la réalité et qu’il organise des événements visiblement trop ambitieux et disproportionnés où il jette visiblement de l’argent pour impressionner, faut rester songeur. Quatrième indice: quand votre associé, qui en a vu d'autres, pense exactement comme vous, voilà, c'est fait, faut reculer. Or, dans le contexte de concurrence intense de notre domaine d'activité, reculer devant de si beaux mandats, ça fait mal. Nous avons donc décidé de ne pas embarquer dans leurs polices d'assurance et de voir si le client resterait client quand même. Nous avons aussi bien fait attention aux comptes recevables et au niveau de risque que nous prenions.

Quelques semaines plus tard, les projets du client furent graduellement annulés ou reportés pour toutes sortes de raisons bidons, et il a tout tenté pour éviter de nous payer, nous faisant à plusieurs reprises sentir sa frustration devant notre refus de ses offres que nous jugions douteuses. Nous avons réussi, après maintes négociations, à sauver l'essentiel de ce qu'il nous devait. Même là, tout a été tenté pour nous arnaquer et nous avons dû négocier avec 4 personnes différentes qui ont su tester notre patience. Mais le pire avec ce type de client, et ils ne sont pas nombreux heureusement, c'est qu'ils savent jouer à merveille la carte de la manipulation. Ils s’accaparent le rôle de victime. C'était trop évident que quelque chose clochait chez cet individu et son organisation, lui qui avait la fâcheuse habitude de ne jamais regarder les gens dans les yeux.

Alors début 2010, dossier clos, nous avons continué notre petit bonhomme de chemin en nous disant qu'il y avait quelque chose de louche, mais bon, sans en être sûrs à 100%. Et puis voici cet article, publié le mois dernier, découlant de ce communiqué émis par l’Autorité des marchés financiers. Une radiation. Des victimes. Des employés lésés. De l’amertume dans les commentaires. Un journaliste qui compare la firme de notre ex-client à Norbourg... Il y a probablement des zones grises dans toute cette histoire, mais la chose à retenir, c'est qu'il faut toujours, en affaires comme dans la vie, écouter cette petite voix qui nous dit de reculer. Elle représente la synthèse complexe d'une multitude de facteurs reconnus et identifiés par notre subconscient, c'est ce qu'on appelle l'intuition. Les gourous savent généralement éviter ces barrières et nous faire passer à l'action. Il n'aura pas réussi avec nous. Dommage qu'il ait possiblement réussi avec d'autres. Car comme le dit si justement mon associé et président de l’agence, Claude Dutil : «en affaires comme en publicité, tout ce qui brille n’est pas de l’or.»

vendredi 23 juillet 2010

Avoir raison

Avoir raison ne rapporte généralement rien et ne fait que très rarement avancer une question, une cause ou un projet. Avoir raison sur qui, sur quoi, et surtout, quelle est notre réelle motivation à vouloir avoir raison, sinon notre peur d’être déclassé ou diminué dans l’esprit des autres? Or, cette peur transpire et avant même de prononcer un mot, nous sommes déjà perdants, car ça se sent. Le problème récurrent avec le principe d’avoir raison, c’est qu’il implique qu’une autre personne aura tort.

En publicité, surtout lorsque nous désirons implanter des stratégies de communication ou des plateformes créatives, nous devons démontrer au client pourquoi ce que nous avançons doit être mis de l’avant, et surtout, pourquoi et en quoi ça va fonctionner, bref, prouver dans la mesure du possible que nos idées vont rencontrer les objectifs. En dehors de cette preuve, nous ne sommes que des «pelleteux de nuages», ou des égoïstes qui veulent se payer un trip de création sur le dos de leurs clients. Là où je veux en venir, c’est qu’il y a une marge importante entre démontrer une démarche et ses fondements, tout ça mis en perspective par nos expériences passées et par notre expertise, et s’obstiner à vouloir avoir raison. Autant les créatifs que les stratèges ou responsables du service clientèle doivent toujours avoir en tête que là ou certains cas nous apparaissent évidents à la lumière de notre vécu de publicitaire, il faudra toujours concilier notre perception avec celle du client, qui de son côté de la clôture, traîne probablement un bagage et un passif bien différents du nôtre, possiblement modelés par des expériences passées avec certaines agences qui lui avaient promis la lune mais qui n’avaient à la toute fin livré que du vent. Nos clients portent en eux une part de subjectivité qui ne demande qu’à être séduite, c’est vrai, mais ils doivent aussi analyser les retombées économiques et politiques de nos plans et concepts. Rien ne sert d’avoir raison: il faut cheminer avec le client et défendre notre démarche dans la compréhension, l’intégrité et la transparence, quitte à parfois laisser aller certaines idées géniales. Nos idées nous appartiendront toujours.

Mon meilleur ami me disait récemment que les gens qui ont des bonnes idées s’attachent trop à celles-ci et ne sont pas pleinement conscients du potentiel quasi intarissable qu’ils portent en eux. Qu’à la place de faire une fixation irrationnelle et émotive sur un concept, ils devraient tout simplement passer à la prochaine idée et avoir confiance en leur capacité créative. En publicité, il faut savoir séduire, mais aussi faire certaines concessions en demeurant confiant. Avoir raison est un luxe inutile et coûteux que nous ne pouvons plus réellement nous permettre, selon moi, autant dans notre vie professionnelle que personnelle. Le réel respect, celui qui rapporte, c’est de laisser à notre vis-à-vis une porte de sortie honorable, ouverte en tout temps, et ne jamais sous-estimer son intelligence.

mercredi 21 juillet 2010

Tout le monde en parle (du moins sur twitter)


Ça s’appelle Empire Avenue. En quelques mots, c’est une plateforme ou un jeu, qui vous donne l’opportunité mesurer la valeur de votre marque personnelle sur Internet, ou encore de votre niveau d’influence. Comment? En vous faisant devenir un titre boursier fictif sur un marché fictif. Assez simple: vous vous inscrivez (la plateforme sera ouverte à tous à partir du 28 juillet, elle est encore sur invitation), vous remplissez à peu près tout ce que vous pouvez remplir, vous établissez des liens avec votre compte twitter, facebook, avec votre blogue, et hop, on vous donne des crédits. Du même coup, des gens peuvent acheter des actions de votre marque, que vous aurez identifiée à l’aide d’un code de moins de 6 lettres (le mien est «matbed»), et vous pourrez de votre côté acheter des actions de personnes que vous connaissez ou que vous trouverez, que ce soit par communautés géographiques, par affinité ou tout simplement par vos réseaux sur les autres plateformes de médias sociaux.

Plus des gens achètent vos actions, plus le prix de votre titre monte et plus vous capitalisez votre marque. De l’autre côté, vous devez gérer vos investissements, soit acheter et vendre au bon moment des actions des autres pour maximiser le rendement de votre portefeuille boursier fictif. Finalement, vous recevrez quotidiennement un revenu proportionnel à votre présence sur les médias sociaux liés à Empire Avenue. C’est basé sur la loi de l’offre et de la demande, à quelques bémols près, dans la mesure ou une clique de geeks bien affûtées pourra facilement se tirer rapidement vers le haut du tableau…

J’ai hâte de voir si cette plateforme passera l’épreuve du temps. D’un point de vue motivationnel, elle joue sur l’estime de soi et la reconnaissance, la compétition est bien présente sans être étouffante et je trouve l’interface plutôt réussie. Jusqu’à maintenant, je peux affirmer que l’expérience est assez positive. J’apprécie aussi le principe de capitalisation de sa personnalité et de son influence, mais ce qui me fascine encore plus sur Empire Avenue, c’est la quasi-transparence du phénomène viral en temps réel. Le mécanisme, qu’on sent en permanence sur twitter, est ici encore plus évident à capter. Ne serait-ce que pour ça, et pour savoir à quoi rimait les gonzillions d’invitations que vous avez peut-être reçues depuis deux semaines, je crois que ça vaut la peine de tenter l’expérience, dans la mesure où vous minimiser les informations personnelles que vous rendrez accessibles.

Je vous laisse sur une vidéo explicative ainsi qu’une entrevue
avec le fondateur du jeu, qui vit à Montréal. Et si ça vous dit, mon titre est encore une aubaine à près de 15$!

lundi 19 juillet 2010

Dieu a toujours raison (ou pourquoi Megan Fox serait sexy, même avec une burqa)

Dieu a toujours raison, c’est bien connu. Pourquoi vénérer quelqu’un qui pourrait avoir tort? Impensable. Alors quand Dieu parle, ou son fils, ou son prophète, il faut écouter, hocher de la tête et acquiescer. Et surtout, croire, avec ferveur, sans jamais douter. Même si c’est parfaitement absurde et que toutes les molécules de notre corps nous dictent le contraire.

Alors quand Steve Jobs affirme que son nouveau téléphone intelligent est la meilleure chose à être apparue sur cette planète depuis l’avènement du pain tranché, il faut le croire. Et quand on découvre, par l'entremise des médias, que son iPhone4 a un grave problème de réception des appels lorsque nous plaçons notre doigt au mauvais endroit, c’est nous qui aurions tort de mettre notre doigt à cet endroit. Car Steve, lui, n’a jamais tort. Il nous fait la faveur de nous donner accès à sa vérité. À LA vérité, devrais-je dire, car selon lui (avec un petit ton hargneux de mauvais perdant en prime), le problème identifié est un moindre mal comparé à ce qu’offrent ses compétiteurs de RIM ou de HTC. À nous de vivre avec.

Et nous, simples fidèles, nous nous précipiterons très bientôt par milliers, comme des poules sans tête avides de nouveauté et d’estime de soi transposée, vers les magasins Apple pour acheter ledit appareil, qui sera muni d’un étui pour limiter le problème de réception des appels. Et ce, même si un iPhone dans un étui devient aussi sexy que Megan Fox portant la burqa. Alors au lieu de se procurer un appareil, celui qui est montré dans les publicités, nous allons plutôt acheter l’idée d’un appareil sexy, sans vraiment pouvoir le montrer. Nous allons aussi carburer à l’idée d’appels vidéo (FaceTime) sans pouvoir vraiment expérimenter la chose, à moins que notre entourage en entier ne possède le même appareil que nous. C’est le passage de la réalité à l’idée de la réalité.

Quand on achète quand même un produit à sa sortie en étant conscient de sa défectuosité, c’est que ce sont nos émotions qui dictent notre comportement d’achat, et non notre raison. J’ai souvent voulu démontrer par une image claire toute l’absurdité de certaines croyances aveugles, mais là, Steve Jobs me donne tout ça tout cuit dans le bec. Êtes-vous de ceux qui croient encore?

Je vous laisse sur cette publicité, particulièrement bien réussie et émouvante, qui démontre à quel point la vie est parfaite si vous, votre grand-père et la planète entière êtes propriétaires d’un iPhone 4, tout en sachant exactement où placer vos doigts pour bien capter le signal. Alléluia.

jeudi 15 juillet 2010

Tromper, pour le mieux


J’ai récemment dénoncé la minceur du contenu d’une campagne publicitaire de la Canadian Association of Petroleum Producers, qui tentait bien maladroitement nous faire avaler que l’exploitation des sables bitumineux albertains respectait l’environnement. Ces andouilles croyaient vraiment nous convaincre que la régénérescence des arbres et de la faune était assurée avec quelques paragraphes de texte maladroit et quelques photos racoleuses. Et bien, j’ai le plaisir aujourd’hui de vous présenter, si vous ne l’avez pas encore vue, une campagne encore plus trompeuse, mais cette fois-ci dans le bon sens. Une création qui nous mène sur une fausse piste pour ensuite pulvériser en millions de grains de sable gluants l’image de l’Alberta et son contexte environnemental lié à l’exploitation des ressources pétrolières. Rethink Alberta. Yeah!


Cette offensive publicitaire, initiée par différents groupes verts, la plupart américains, est axée sur un film publicitaire de 90 secondes diffusé sur youtube et sur le site rethinkalberta.com. La convergence vers le film est orchestrée à partir de bannières publicitaires, d’achats de mots-clés reliés au tourisme de l’Alberta et à des panneaux d’affichage diffusés dans 4 villes américaines ciblées, soit Portland, Denver, Seattle et Minneapolis. On frappe dans le mille. Et là où ça fait le plus mal, en comparant l’impact des sables bitumineux à la catastrophe BP. Les images parlent d’elles-mêmes et sont difficilement répudiables. Mais mieux encore, le sens du «timing» de l’offensive ne pourrait mieux tomber. De un, le désastre écologique dans le Golfe du Mexique entraîne des moratoires sur le forage en mer, ce qui amplifiera la pression sur la demande en pétrole issu des sables bitumineux. Or, cette demande accrue provoquera une accélération du développement de ce secteur polluant, mais cette accélération demeurera politiquement et intrinsèquement liée à l’opinion publique. De deux, la clientèle ciblée, les touristes américains qui seraient tentés de visiter l’Alberta, est constituée d’individus qui recherchent les grands espaces et la nature. On pourrait donc extrapoler sur l’effet doublement démotivant de la publicité sur ces segments fort probablement sensibles à la cause environnementale. Et de trois, la plupart des médias canadiens ont parlé de la campagne et le gouvernement provincial de l'Alberta promet de répliquer, ce qui donne encore plus de visibilité à l'initiative. Qui dit mieux?


Ça fait du bien de constater que la publicité peut parfois servir à dénoncer les abus et l’injustice. Qu’elle peut être réellement utile. Que notre rôle, à nous les publicitaires, ne se limite pas qu’à encadrer des univers de marques à des fins purement commerciales, dans un pays qui tire une trop grande partie de sa richesse dans la ruine d’écosystèmes, à contre-courant de l’intérêt collectif. Et dont trop d’habitants, dont beaucoup ici au Québec, éprouvent malheureusement une fierté irrationnelle à conduire des pick-up.


Je vous invite à signer la pétition sur le site. Pour en savoir plus sur la campagne, un article assez complet de Radio-Canada.

mardi 13 juillet 2010

La musique en publicité: 12 pouces, 5 neurones?



En publicité, si nous désirons que notre message soit retenu et qu’il induise le comportement désiré, on prétend que ce qui prime en création est la sacro-sainte «connexion émotionnelle». Or, pour établir cette connexion, il faut amplifier les émotions. Avoir une bonne idée, un bon «flash créatif», ne sera pas suffisant, car il faut marquer les esprits. La musique et l’environnement sonore représentent un outil important pour y arriver, mais certains, dont Subway, ont le don de gâcher la sauce.

En radio, on parlera de projection quasi cinématographique par l’auditeur de la publicité écoutée, dans son propre cerveau. D’ailleurs, je me suis souvent surpris à constater que lorsque nous testions la performance de certaines campagnes radiophoniques, un pourcentage non négligeable des personnes sondées croyaient avoir vu la publicité à la télévision. Sur ce media, les ritournelles publicitaires, plus souvent appelées «jingles» dans le milieu, ont souvent la cote en ce qui a trait à leur faculté de provoquer la mémorisation. Mais qu’en est-il d’un «jingle» agressant diffusé à trop forte fréquence? Favorisera-t-il la mémorisation de force, donc un positionnement en tête de liste lors de l’achat éventuel ou déclenchera-t-il le «démarketing», soit une baisse des ventes reliée à une décroissance du capital de sympathie de la marque? Les réponses ne sont pas toujours claires, car plusieurs facteurs entrent en ligne de compte, dont le type de produit ou service et le niveau de risque d’implication à l’achat, mais parfois, peu importe, il y a rupture avec le consommateur, au-delà du principe de cap de fréquence en média. C’est mon cas avec la publicité de Subway «12 pouces, 5 dollars» présentée ici en intro. Ma perception de la marque et mon comportement d’achat sont à leur plus bas. Vous me direz, probablement à raison, que je ne fais pas partie de la cible, mais bon, un fait demeure, je n’ai plus envie d’y aller et je ne suis pas seul.


En télé, on peut également se servir du «jingle» ou de la signature sonore, mais la musique jouera un rôle encore plus grand selon moi. En fait, au-delà de la valeur du concept publicitaire ou de la qualité de la réalisation, je crois réellement que la musique joue un rôle-clé souvent négligé par les annonceurs. La musique, véritable révélateur de la mémoire, surtout si elle est associée à une émotion positive ou touchante, favorisera réellement cette situation de complicité entre la marque et le consommateur en générant des ambiances subtiles. On n’a qu’à penser à la publicité de Tropicana que j’ai abordée à quelques reprises. Comme amplificateur, on ne fait pas mieux. Je vous laisse donc sur le film génial créé par SID LEE pour Adidas Originals plus tôt cette année, en vous demandant ceci: est-ce que ce film publicitaire et ses dizaines de vedettes aurait été aussi efficace si sa musique avait été traitée différemment?

jeudi 8 juillet 2010

Prendre le temps

La publicité est à l’image de la société, elle évolue, elle se replie parfois, se cherche, se retrouve, reprend son rôle d’innovateur, mais de tous temps, et c’est toujours aussi vrai aujourd’hui, la publicité va vite. Et quand je dis vite, je parle du rythme qu’elle impose à ses stratèges et à ses créatifs. Ce rythme enlevant représente à la fois ma plus grande source de satisfaction et ma plus grande frustration. Les semaines qui se succèdent à un rythme fou, les mandats qui se bousculent et l’adrénaline qui coule à flot, particulièrement avant et pendant les présentations, c’est bien beau, mais il y a un lourd prix à payer. Les semaines qui se bousculent deviennent vite des années, nos enfants vieillissent trop vite, et le corps en prend souvent pour son coup. Sans compter une petite voix qui nous répète souvent, sans qu’on sache trop pourquoi, ou enfin sans qu’on veuille trop y réfléchir: «Tout ça pour ça? Pour de la publicité? Vraiment?».


Claude Cossette, l’un des plus grands publicitaires de l’histoire du Québec, a quitté la publicité en 1984, apparemment pas mal désabusé, et ses essais ultérieurs, dont «La publicité, déchet culturel», ont confirmé depuis sa grande préoccupation pour l’éthique et les effets collatéraux de la publicité sur la société. Et voilà que cette semaine, Alex Bogusky, associé fondateur de ce que nous pourrions appeler la meilleure agence du monde, Crispin Porter + Bogusky, créatif de la décennie selon Adweek, quitte le monde de la publicité pour mieux «sentir les fleurs». Il a 47 ans. Et son cas n’est selon moi pas aussi isolé qu’on le croit.


Ce billet n’a pas d’intention particulière, autre que celle de souligner, sans prétention, l’importance de prendre son temps, de ralentir le temps qui passe, pour le ramener à une dimension plus humaine. Que même si nous sommes parfois au cœur de notre parcours professionnel, toute cette pression et ce stress quotidien, qu’ils viennent des autres, des clients, du milieu, ou de soi-même, ne vaut pas qu’on oublie implicitement l’essence même de sa vie: prendre conscience de chaque inspiration, de chaque expiration, pour encore mieux voir en avant, tout en profitant au maximum de ce qui nous glisse lentement et inexorablement entre les doigts, notre existence et celle de ceux que nous aimons.


Je vous laisse sur un clip d'une chanson qui va intuitivement dans ce sens, de mon groupe fétiche, Radiohead: Everything in its right place.


mardi 6 juillet 2010

Le sexe au sésame


La Fondation Staying Alive de MTV, vouée à la prévention et au combat contre le sida, a tout récemment diffusé les publicités montrées ci-haut et qui datent de 2008, lors du Festival Solidays qui a eu lieu à Paris la semaine dernière. Ce festival se veut une grande fête de la musique dans l’axe de la lutte contre le sida.

Alors, est-ce que le spectacle de marionnettes inspiré de Sesame Street vous a incité à porter ou à exiger qu’on porte le condom? Dans la négative, ne vous en faites pas trop, car la cible visée doit se situer entre 15 et 20 ans d’âge et sa réalité doit être à des années lumières de la vôtre. Ceci étant dit, j’aime bien qu’on appelle un chat un chat. Et ces différentes publicités crues le font sans ménagement, quitte à jouer dans la démagogie. On sent les thèmes bien délimités, donc provenant sûrement des conclusions de groupes de discussions auprès des jeunes, ce qui est en soi une bonne chose car nous demeurons branchés sur leur perception et non sur notre interprétation de celle-ci. De plus, l’humour acide, une tonalité qui touche généralement cette cible, communique implicitement plus que des problèmes potentiels, mais aussi les bénéfices principaux liés à l’utilisation du condom, soit le plaisir et la tranquilité d'esprit. Malheureusement, et c’est là peut-être mon seul bémol, je trouve que la femme y est utilisée comme un vulgaire accessoire et de manière clichée, voire sexiste: de jouer sur l’imagerie fantasmatique de l’infirmière plus «mature» me semble dépassé, mais bon, c’est ma lecture et je suis probablement trop vieux pour être objectif.

Ceci étant dit, ça fait changement du discours moralisateur et de l’approche classique de prévention, ce qui doit être souligné, même si plusieurs offensives se sont déjà démarquées en ce sens. La publicité sociétale n’a pas à surmonter cette barrière que retrouvent les grandes marques commerciales, qui doivent lutter contre les appréhensions de la population qui est lasse de se sentir manipulée, alors si elle capte l’attention, elle se donne des chances de vraiment modifier certaines perceptions ou mieux encore, certains comportements. Et par le fait même de contribuer à sauver potentiellement des vies.

Via le blogue Kesako. Merci à notre cousin français Steve Faisant
pour le lien!

vendredi 2 juillet 2010

Les «Vrais»

Ils sont une poignée. Je les appelle «Les Vrais». Les «Vrais», avant tout, savent ce que vous ne savez pas et ne peuvent s’empêcher de communiquer leur savoir. C’est parfait, l’altruisme est une vertu. Les «Vrais» ont aussi une opinion sur tout et ont des convictions inébranlables. Et parce qu’ils sont altruistes et qu’ils savent discerner ce qui est bien de ce qui est mal, ce qui doit être acceptable de ce qui doit être proscrit, les «Vrais» ne peuvent s’empêcher de faire la morale. C’est là que ça se gâte.


Aujourd’hui, je vais vous parler des «Vrais» dans le contexte des médias sociaux, mais sachez qu’ils sont partout. Voyez-vous, quand on parle des principales plateformes, que ce soit Twitter, Facebook ou LinkedIn (mais je sais, il y en a d’autres), on peut facilement, dès les premiers jours où on y fait nos premiers pas, croiser des «Vrais». Ils nous feront remarquer, à raison quand même, que nous ne devrions pas laisser des jeux insignifiants sur lesquels on passe trop de temps sur Facebook s’afficher automatiquement sur nos statuts. Les «Vrais» détestent Farmville ou Mafia Wars car trop de gens y jouent. Ils forment un clan et, implicitement, dégagent une confiance et une assurance absolue sur ce que doit être la réalité des médias sociaux. Ils décréteront unilatéralement qu’ils ne faut pas faire d’auto promotion sur Twitter à une fréquence de moins de 8 heures entre les tweets, avec un cap absolu de deux, par exemple. Ils décideront aussi que vous devez être toujours de bonne humeur sur les médias sociaux. Et blablabli et blablabla. Et prendront un plaisir physique à peine camouflé à vous rappeler à l’ordre, car ils s’autoproclament «régulateurs» et se donnent tous les droits de vous pousser leur réalité dans la gorge. Mais lorsque vous grattez un peu, vous trouvez souvent des gens démunis sur le plan relationnel et en déficit d'estime de soi, donc pas super bien dans leur peau et qui sont, par le fait même, à l’origine de la majorité des cyberconflits. Vous trouvez aussi des gens qui ne peuvent accepter qu’on puisse voir les choses différemment. Et ils se connaissent tous. Et partagent tous le même dogme, à quelques virgules près. C’est un conclave de geeks. Une chambre des échos stérile.

Je pourrais partir en cavale pour rétablir certains faits, certaines réalités, mais je ne le ferai pas. Savez-vous pourquoi? Parce que ma réalité ne vaut pas plus que la leur et que mon temps m’appartient. Mais je crois fermement que les médias sociaux sont des plateformes technologique, point. Elles sont ce que nous en faisons. Elles sont des environnements libres, dans la mesure où les lois du code civil et criminel y prévalent tout autant que dans la vraie vie et qu'on y respecte la nétiquette. La loi de l’intérêt y prime avant tout. Madame Tartampion me tape sur les nerf? J’arrête de la suivre. Jo Blo diffuse trop d’autopromo à mon goût? Parfait, même chose. Ti-Clin me harcèle? Je le bloque. Simple, non? Un environnement libre où des grappes se forment par affinités, où des clans se font et se défont, où évoluent des névrosés, des gentils, des influenceurs et des moutons. C’est le reflet de la société. Alors vous me direz que les «Vrais» ont le droit d’exister, et je vous répondrai : absolument! Je vous dirai aussi que j’ai le droit d’écrire qu’ils me tapent sur les rognons avec leur morale à 3 sous et que je ne suis pas le seul à se sentir ainsi à la lumière d'échanges avec de nombreuses personnes ces derniers jours.


Pour terminer, il ne faudrait pas mettre tout le monde dans le même panier. Michelle Blanc, par exemple, est une sommité, même si elle est parfois tranchante. Elle se base sur de la recherche et sur une expérience pointue et très stratégique des médias sociaux dans un contexte généralement d’affaires. Elle est une experte et elle n’est pas seule, pensons aussi à Luc Dupont. Les «Experts», selon moi, sont ceux qui favorisent réellement les avancées car ils démocratisent, éduquent, et prônent une éthique saine. Un «Vrai» n’est pas un expert. Il voudrait en être mais ne le sera jamais, car il passe trop de temps à faire la morale. Et parce qu’il est trop souvent incapable de se détacher de la nostalgie qu’il ressent en se remémorant la période où il évoluait sur des BBS souterrains occultes, la nuit, en 1997, tout en fantasmant sur Angelina Jolie dans le film Hackers, seul avec ses kleenex dans le sous-sol humide de ses parents. Car voyez-vous, la facilité d’utilisation, la liberté et la démocratisation des outils informatiques ne sont pas faits pour tous…

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