Quand une marque comme Pepsi se donne la peine de lancer une campagne sociétale participative en y investissant près de 1,2 millions de dollars juste cette année au Canada, je reste dubitatif. Pepsi n’existe que pour nous aider à nous injecter dans les veines, par voie orale, du caramel liquide pas très subtil. Parfois sans calories avec des édulcorants, parfois avec du sucre bête. Nous avons le droit d’aimer ça. Pepsi a le droit d’en vendre. Je prône la liberté de commerce et ne suis en aucun point un ayatollah, à part peut-être pour la cigarette, mais là n’est pas le point. Je me demande tout simplement si une tactique sociétale et participative mise de l’avant par une entreprise privée doit être prise au sérieux. Car c’est de ça que nous parlons. De perception, votre perception de la marque, qui apparemment, selon Pepsi, sera plus facile à modifier et à induire en comportement d’achat par une approche socialement responsable que par une approche créative plus traditionnelle.
À ce que je sache, peu importe les bonnes intentions de sa nouvelle présidente, Indra Nooyi, PepsiCo doit tout de même sa raison d’être au principe de vendre du cola. Elle doit rendre des comptes à ses actionnaires, doit engranger des résultats et une croissance qui rejoindra les objectifs fixés. PepsiCo est une entreprise privée qui fonctionne uniquement à l’intérêt. Or, d’être socialement responsable par intérêt minimise-t-il le bien qui pourrait en ressortir? En d’autres mots, faire le bien pour vendre plus de cola est-il moins louable que faire le bien par pur altruisme? Absolument.
Plusieurs entreprises empruntent selon moi la voie insidieuse de l’implication sociale pour maximiser leur capital de sympathie et, par le fait même, leurs ventes. Mais tout ça n’est qu’une mode, car passés les pionniers de ces tactiques de «bien pensants» qui redoubleront d’ardeur pour nous faire croire à leurs bonnes intentions, les consommateurs n’y verront que la tactique qui se cache derrière. On ne trompe pas le détecteur de «bullshit» du consommateur bien longtemps. Le bien qui sera fait créera des attentes futures qui ne sauront être comblées si les stratégies de marques changent. Qui plus est, ce n’est pas le rôle des entreprises privées de décider quelle cause prioriser au dépend d'une autre. Ce sont plutôt à nos gouvernements inertes de mettre leurs culottes une fois pour toutes, ne serait-ce que pour empêcher les vendeurs du temple de nous rendre socialement accros à leurs stratégies biaisées.
L’espace fiscal occupé par les entreprises a atteint un niveau plancher record, surtout à cause de la concurrence nord-américaine pour attirer les grandes corporations, mais aussi grâce à leur chantage et à leur démarchage auprès des gouvernements pour qui l’emploi est un monstre sacré sur le plan politique. Aurions-nous réellement besoin de campagnes sociétales si la juste part d’impôts des entreprises était prélevée? Sommes-nous bassement à vendre? Je suis un publicitaire, j’aime la publicité, mais pas au prix de ce niveau d’opportunisme. Respecter l’intelligence du consommateur, c’est accepter de lui communiquer implicitement notre intention commerciale tout en le séduisant par la créativité. La campagne icicestmieux.ca, c’est l’équivalent d’un gros barbu insignifiant qui exige qu’on mentionne son nom lorsqu’il donne 50$ au téléthon. Vivement pour un retour à l’avant-plan de Claude Meunier, dans un but mercantile avoué.
jeudi 27 mai 2010
L’implication sociale en publicité de Pepsi: hypocrisie ou progrès ?
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Ça me fait penser, également, à l'initiative « Vraie beauté » de Dove, mettant en valeur la valeur véritable de la femme - sa beauté à l'intérieur.
RépondreSupprimerTout un contraste face aux annonces de Axe, par exemple, avec les filles sexy qui font le « Bowchickawawah ». Dove se voulait une réplique aux campagnes sexuées de Axe.
Eh bien, figurez-vous donc que Dove est une propriété d'Unilever Inc... tout comme Axe d'ailleurs.
L'implication sociale d'une marque ou d'une compagnie a toujours été une forme d'hypocrisie en quelque sorte. Quand j'étais à l'école primaire, Desjardins avait un programme pour apprendre les bienfaits de l'épargne. Québon donnait gracieusement des berlingots à la collation et la pépinière du coin avait aménagé la cour d'école en prenant soin de mettre une affiche pendant la durée des travaux.
RépondreSupprimerIl ne faut pas se faire accroire des histoires. Si Adidas décide demain matin de chausser les enfants d'Afrique, c'est dans le but de faire rayonner sa marque. Il en reste que la résultante est fort appréciable. Si ça profite vraiment aux gens, pourquoi pas.
Je suis pas trop sûr. Bien que le profit guide les stratégies de Pepsi, il y a quand même des individus avec leur morale dans cette compagnie. Pepsi fait des actions dans la vie réelle et dans ce milieu, et la pub le sait, tout n'est pas que de chiffres et de logiques.
RépondreSupprimerEn soit, Pepsi pourrait garder son million et le distribuer en dividendes. Non, ils ont décidé de faire un projet pour les collectivités. Ils le font sûrement pour leur branding, mais si toute la pub pouvait prendre cette forme, on serait tous plus riches de projets collectifs.
Enfin, saluons que Pepsi ne fait pas un concours bidon insipide sur un party de golf avec des belles filles mais bien quelque chose de positif et constructif.
@David
RépondreSupprimerEn tout cas, Pepsi a entièrement atteint ses objectifs avec toi, ta perception étant favorable. Vois-tu, nous divergeons sur un point, soit sur les intentions de Pepsi et de ses gens. Le problème de la marque n'est pas d'être connue ou «top of mind», de là son retrait du superbowl, mais bien un problème qualitatif de perception par rapport au produit dans un contexte ou la santé est la plus grande tendance du 21e siècle avec l'environnement. Leur stratégie ne vise qu'à aligner la marque et susciter du capital de sympathie. Leur cynisme, selon moi, est sans nom, même si du bien sortira effectivement de cette campagne.